Avis d'experts

Préserver la prospérité du commerce international

1 avril 2021
Simonetta Zarrilli, Cheffe du programme Commerce, genre et développement, Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED)

Micro-entrepreneurs : Surmontez les défis actuels du commerce international

 

Les mesures de confinement adoptées dès la première vague de la pandémie de COVID-19 se sont traduites par un arrêt brutal des échanges internationaux, avec de graves conséquences pour les petits commerces. Leur activité pratiquement réduite à néant, il leur a fallu puiser dans leurs réserves pour subvenir aux besoins de leurs proches. À la réouverture des frontières, la reprise des activités s’est souvent faite à un niveau moindre que celui d’avant la crise.

Face aux nouvelles exigences, telles que les certificats sanitaires, et aux surcoûts engendrés, de nombreuses entreprises ont dû revoir leurs stratégies.

Or, pour ces micro-entrepreneurs, le commerce est un impératif. C’est particulièrement vrai pour les femmes qui sont les plus actives dans ce secteur d’activité. Le bien-être de leur famille en dépend, et plus encore l’éducation de leurs enfants, qui est le meilleur moyen d’échapper à la pauvreté.

© UNCTAD
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Les alternatives à disposition des petits commerces

 

Certaines entreprises se sont résolues à s’approvisionner localement, tandis que d’autres ont opté pour les services des sociétés de transport. D’autres encore ont franchi une étape supplémentaire en recourant au commerce électronique. Autre alternative viable, certains micro-entrepreneurs se sont tournés vers l’agriculture et écoulent eux-mêmes leur production, avec pour effet de rendre leur activité plus durable.

Ces changements n’ont toutefois pas été simples à réaliser. Le recours aux sociétés de transport engendre des coûts supplémentaires qui viennent grignoter les marges déjà modestes de ces petits commerces. Le fait de s’approvisionner localement ne permet pas de s’assurer du meilleur rapport qualité-prix, ni de tirer parti de taux de change avantageux. Enfin, se tourner vers l’agriculture demande de développer de nouvelles compétences.

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Face à ces difficultés, la tentation est grande de se tourner vers le commerce international informel

 

Afin d’éviter les formalités douanières, que ce soit celles préexistantes ou celles induites par les nouvelles mesures sanitaires, les petits commerces peuvent être tentés de traverser les frontières de manière informelle. Cette démarche, déjà risquée par le passé, l’est plus encore aujourd’hui. Elle expose les petits commerçants, et en particulier les femmes, aux risques de harcèlement, de corruption, de verbalisation ou de confiscation des biens, sans compter les risques pour leur santé. Les douaniers tanzaniens ont récemment compté plus de 200 points d’entrée non autorisés entre la Tanzanie et la Zambie, et ce n’est qu’un exemple. Si le commerce transfrontalier informel est un moyen de maintenir à flot ses activités, cette option n’est absolument pas viable dans le temps.

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Les moyens de soutenir le commerce international

Pour la CNUCED, la solidité d’une stratégie commerciale repose avant tout sur la bonne connaissance des règles du commerce et des procédures douanières, ainsi que des exigences en matière de santé et d’immigration.

Des ateliers de formation menés récemment près de certains postes-frontières au Malawi, en Tanzanie et en Zambie, ont montré que plus les participants prenaient conscience de leurs droits et de leurs devoirs, moins ils étaient tentés par un passage frontalier informel. En outre, le fait de développer leurs compétences entrepreneuriales leur permettait de saisir de nouvelles opportunités commerciales, et ainsi de mieux récupérer du ralentissement causé par la pandémie.

La tâche des pouvoirs publics n’est pas seulement de faciliter le commerce international, par exemple en simplifiant les régimes commerciaux, mais aussi de s’assurer que les entrepreneurs puissent aisément se familiariser avec eux.

Dans cette optique, les exigences vis-à-vis des petits commerçants pourraient être davantage allégées, comme le fait d’être dispensé de la preuve de l’origine des marchandises.

Par ailleurs, il serait judicieux que les pouvoirs publics établissent des conditions attractives pour inciter les entrepreneurs modestes mais dynamiques à formaliser leur activité. À cet égard, une plus grande flexibilité des formalités d’enregistrement ou la possibilité de les effectuer aux frontières seraient opportunes.

Les opérateurs informels ont été exclus de la plupart des programmes d’appui mis en place en réponse à la crise sanitaire. Les aider à prendre la mesure des bénéfices amenés par le simple fait de formaliser leur activité pourrait les inciter à s’enregistrer.