Seules les femmes peuvent mener le changement dans le secteur informatique
Women in Digital (Femmes dans le numérique) est une entreprise technologique primée qui encourage les femmes à travailler dans le secteur technologique – et les inspire à devenir des leaders. Evelyn Seltier s’est entretenue avec sa PDG, Achia Nila, sur sa volonté d’autonomiser les femmes dans un secteur dominé par les hommes.
Pourquoi êtes-vous devenue PDG d’une entreprise technologique qui appuie les femmes dans le secteur informatique ?
En grandissant, la question du genre ne m’a jamais effleurée, jusqu’à mon premier jour d’université où j’ai été choquée d’être la seule fille inscrite en informatique. L’université ne comptait que deux autres étudiantes, et au Bangladesh, rares étaient les femmes travaillant dans l’espace numérique.
Au cours de ma deuxième année, j’ai postulé pour mon premier emploi. J’ai réalisé que les femmes étaient recrutées uniquement pour faire du graphisme et que le codage leur demeurait inaccessible. Ce premier emploi a exigé que je me batte, mais j’ai été sélectionnée, et suis devenue la seule femme dans le département de codage. Les difficultés étaient nombreuses, mais plus je travaillais dans ce domaine, plus je comprenais les obstacles auxquels les femmes étaient confrontées.
Cela m’a brisé le cœur de voir la société juger notre existence, nos capacités et nos rêves en fonction d’une chose : notre genre. J’ai alors pris conscience que je devais attirer davantage de femmes et de filles dans le secteur technologique, et que par la technologie je pouvais aider à leur autonomisation. C’est ainsi que mon organisation, Women in Digital, est née, où les femmes sont traitées de la même manière que les hommes.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les difficultés spécifiques rencontrées ?
La question du genre, déjà, est une difficulté fondamentale. Je suis une femme, mais aussi une femme instruite en technologies, et une entrepreneure. En outre, je travaille pour les femmes, et dirige une organisation composée de femmes.
Les temps ont changé : il est temps d’admettre que les femmes peuvent gérer à la fois le foyer et le travail. Women in Digital œuvre en ce sens constamment. Plus précisément, pour attirer davantage de femmes dans le secteur numérique, il faut leur ouvrir l’accès à l’éducation technologique, à Internet, aux équipements, aux emplois et aux revenus, et surtout modifier l’opinion des gens à cet égard.
Certaines femmes parviennent à démarrer leur carrière dans le secteur des technologies. Elles demeurent toutefois cantonnées au premier échelon en raison d’un environnement hostile. La participation accrue de femmes au niveau politique pourrait aider à créer un environnement commercial favorable aux femmes, et transformer cet état de fait.
Vous avez rejoint l’Union internationale des télécommunications en tant qu’experte internationale en informatique, la première personne du Bangladesh sélectionnée pour ce poste. Comment voyez-vous votre rôle en tant que femme leader ?
Il est primordial que l’UIT appuie les femmes à des postes de direction, et que ces femmes en inspirent d’autres à assumer ce type de fonction. Malgré mon poste, lors de réunions à l’extérieur, on me juge encore parfois en fonction de ma nationalité et de mon genre plutôt que sur mes capacités.
Il me faut constamment faire mes preuves. Les femmes doivent souvent forcer les obstacles internes et externes afin de gagner en confiance et exprimer leurs idées. Dans le secteur privé, rien que la présence d’une femme directrice peut saper la confiance, alors qu’il faudrait plutôt reconnaître cet atout à la fois personnel et organisationnel. Davantage de femmes devraient être recrutées aux postes de direction, et en particulier au niveau politique, afin d’amener un réel changement.
Quels sont vos projets ?
Lorsque j’ai lancé Women in Digital, je me suis concentrée sur le marché international. C’est ainsi que j’ai été sélectionnée pour le projet du Centre du commerce international au Bangladesh, financé par le fonds fiduciaire néerlandais. Ce projet m’a énormément aidé à développer mon entreprise à l’international.
À présent, j’aimerais reproduire mon modèle commercial dans d’autres pays. En fin de compte, nous avons besoin d’impliquer davantage de femmes dans les technologies, et seules les femmes pourront aider à atteindre cet objectif.
